Ce compte rendu établi par Christine, qui assiste à la séance, permet d’en suivre le déroulement pas à pas. Un grand merci à elle pour la précision de sa prise de notes.

Nadine travaille dans un organisme de protection sociale et d’accompagnement des familles en situation de fragilité (ruptures familiales, précarité…). Réagir avec efficacité, trouver chaque fois les solutions adaptées, est son quotidien.

Or, un mois et demi avant cette séance, elle a, elle-même, subi une violente agression physique en prêtant assistance à une collègue, maman d’un jeune bébé, menacée dans un conflit de séparation. Depuis ce jour, Nadine se sent mal, car, d’une part, traumatisée, elle ne se souvient pas de tout ce qui s’est passé, c’est comme si tout un pan de cet événement avait disparu ; et, d’autre part, dans le cadre de son travail où elle est amenée à recevoir des femmes victimes de violence, elle dit être envahie par une grande colère qui ne lui permet pas de garder la distance nécessaire lors des entretiens qu’elle doit mener.

Johanne lui précise dans un premier temps que, lorsqu’on ne se souvient pas, c’est le mental qui ne se souvient pas. Mais la trace mémorielle, elle, est restée quelque part dans le corps. Nadine n’a jamais fait d’E.F.T. Johanne lui explique brièvement qu’on va stimuler un certain nombre de points sur le corps, qui sont des points utilisés par les acupuncteurs. Le travail s’effectue en miroir, chacun tapotant sur son corps. Elle lui remet un schéma avec les points qui seront tapotés, et qu’elle pourra garder.

J : Tu parles de mal-être, de colère… comment se manifeste-t-elle, cette colère ?
N : Elle se manifeste au travail. Quand je reçois des personnes qui… (mimique indiquant que ces femmes la ramènent à ce qui s’est passé pour elle)
J : Comment sais-tu que c’est de la colère, comment tu la sens, cette colère ?
N : Je la sens à l’intérieur, elle circule partout. (Elle montre tout le haut de son corps, partant du poitrail et englobant les bras). Je la sens dans la tête aussi.
J : Tu peux l’évaluer, cette colère ? entre 0 et 10, elle serait à combien ?
N : Je dirai 8
J : Alors, tu vas faire comme moi. Tu vas tapoter sur les points et tu vas répéter ce que je dis.

Sur le point Karaté : J : « Même si j’ai cette colère à 8, je m’accepte, quand même telle que je suis. »
On poursuit avec la ronde : Cette colère (tête) / cette colère (début sourcil) / une colère à 8 (coin de l’œil) (« et toi, tu te connectes à ta colère », précise J.) / colère à 8 (sous les yeux) / j’ai cette colère (sous le nez et menton) / une colère à 8 (clavicule) / j’ai cette colère à 8 (sous le bras) / cette colère, je la sens à 8 (sous le sein)

J : Maintenant, remets-toi en contact avec cette colère. Tu vois une personne qui vient en entretien, essaie de revenir à ce qui se passe, cette colère, est-ce que tu la sens toujours ?
N : Ça a lâché (elle montre sous les seins, entre les seins). Il reste comme un nœud. Un gros nœud, qu’elle évalue à 5, le trouvant « un peu mou ».
Après une ronde, Nadine ne cache pas son étonnement : « il s’est délié, je ne sais plus où il est. Je le mets à zéro »
J : Remets-toi encore en situation. Tu es au travail et une personne s’adresse à toi… Est-ce que tu sens encore de la colère ?
N : La colère, le ressentiment. Elle est passée sous le 5… Vraiment je ne sais pas.
J : C’est drôle, hein… ? tu as vu le pouvoir que tu as !
« Même si j’ai encore un reste de colère entre 3 et 5… tu dirais qu’il est où, ce reste ?
(Nadine montre le thorax) … « Même si j’ai ce reste de colère, là, je m’accepte du mieux que je peux. »
Une ronde de tapotements sur ce reste de colère fait apparaître « un reste sur l’estomac ». Elle précise : « une ceinture qui me lie. Cette colère me plaît bien, elle me donne de la légitimité. »
J : C’est agréable, cette colère ?…
N : Non. Elle est inconfortable à 8. Parfaitement inconfortable !
Après une nouvelle séquence de tapotements, elle décrit la ceinture, « En cuir marron, elle est large, très large, mais elle a lâché des crans. »  (en dessous de 5). Une nouvelle ronde la ramène entre 0 et 1 (Nadine rit, amusée par ces changements aussi palpables). On tapote encore sur ce petit reste…
J : Reviens te mettre en situation, tu es au travail… (Nadine ne sent plus la ceinture. C’est plus léger.) Prends un cas précis et entends cette personne, vois-la, en face de toi, mets-toi en situation. Tu peux ressentir la colère ?
N : Non… j’ai une grosse émotion qui monte. Les larmes arrivent.
J : Tu peux nommer l’émotion qui est là ?
N : Je la sens qui monte.
Nadine est connectée à ce qui se passe en elle.

 « Même si j’ai cette émotion qui monte à 7, je m’accepte complètement et profondément, avec ce que je sens. »
Une émotion qui monte à 7 / je ne sais pas ce que c’est  /c’est une émotion avec une envie de pleurer / cette émotion à 7…
Après la ronde, Nadine précise : « Elle est liée à la peur que j’ai eue. », « C’est pas la peur. », « C’est une émotion douce, une émotion d’une maman câline. » « C’est gênant, car elle est reliée à la mort », évaluation à 7.
On tapote sur tout cela : une maman câline à 7 / elle me rappelle la mort / une maman câline à 7 / cette émotion qui monte / une émotion de maman câline /… et après la ronde, elle précise : C’est plus la même chose. L’émotion est là, en moi, dans une espèce de vision… C’est pas ‘maman câline’, c’est plutôt ‘maman chagrine’.

N : Je sens encore quelque chose au niveau du thorax, une oppression qui coupe le souffle.
C’est un poids qui tient toute la sphère. (Elle montre le thorax en faisant un mouvement tournant). Elle évalue le poids à 9, et peut même préciser qu’il est en fonte.
La ronde se poursuit sur les doigts cette fois : Ce poids je le sens à 9 / un poids en fonte / ce poids / …

J : Reviens le voir. Il est à 9 ?
N : Il est à 7. Elle met la main sur le cœur.
J : Il s’est invité là, sur le cœur, ou il y était déjà ?
N : Il était déjà là.
J : Tu te souviens depuis quand il est là ?
Nadine reste silencieuse et Johanne enchaîne : « Même si j’ai encore ce gros poids à 7, c’est OK, je m’aime quand même et je m’accepte complètement. »
Au cours de la ronde, Johanne poursuit l’investigation vers plus de spécificité. Nadine peut sentir le poids, toujours en fonte, et « enfoncé ». Après avoir tapoté le point de gamme (sur le dessus de la main), elle rit franchement étonnée. « C’est spectaculaire ! ». « Je crois qu’on a décollé la pulpe du fond », « J’avais mal, et là, je ne sens plus rien. »

J : Si on revient en situation : Tu es au travail, avec une personne qui te parle… Est-ce qu’il y a encore un inconfort ?  (Nadine secoue la tête) Plus de colère ?  Le poids… ?  ( Elle ne trouve plus trace de dérangement)… Tu te sens libre d’écouter les personnes, plus disponible ?
N : Je me sens plus à disposition. Ce n’est plus mon histoire.

J : Si tu penses à ce qui s’est passé, est-ce qu’il y a un inconfort particulier ?… On peut revenir sur l’évènement ? C’était à quelle date d’ailleurs ?
N : Le 10 novembre. (La date fuse, donnée sans une hésitation)
J : Et tu n’as pas de souvenirs de ce qui s’est produit ? 
N : Il manque un instant court. (Nadine rajoute un geste de la main, avec les doigts pour désigner ce qui manque)
J : Quelle est la première image qui te vient quand tu penses à ça ? Est-ce que c’est une image réelle ou une image reconstituée… ?

: C’est pas reconstitué. Je vois mes lunettes un peu plus loin (elle tend un bras, évoquant le souvenir vécu)
J : Bon… tu ne te souviens pas d’être tombée… mais tu vois tes lunettes par terre. On va prendre cette image.
« Même si je vois mes lunettes, je m’accepte totalement avec cette histoire. »
Ronde sur l’image des lunettes : mes lunettes par terre / à côté / mes lunettes par terre /…
J : Et tu te vois les ramasser ?
N :  Ça a pris un certain temps pour les ramasser. 
J : Tu pourrais retrouver la sensation quand tu as vu tes lunettes ?
N : La sidération. Le temps d’évoquer la stupeur, sans mot, ce temps sur lequel Nadine se connecte maintenant, ce qui monte est : j’ai compris… mais… c’est pas possible ! c’est fort à 10.
« Même si c’est pas possible, à 10, je m’accepte avec ce que je vis. » Ronde avec « C’est pas possible »

J : Tu te remets dans ce moment-là et tu te dis : « C’est pas possible !». Il y a une différence avec tout à l’heure ?
: Oui … mais je sais pas mettre de mots.
Elle ne trouve aucune image, ni forme, ni couleur pour évoquer ce qui est présent, là…
« Même si j’ai encore un truc, sans les mots, je m’accepte avec cette histoire. »
Ronde avec : j’ai encore un truc / mais j’ai pas les mots / je sens un truc / je comprends pas / …

J : Et si on allait voir… ? le « c’est pas possible ! » …
N : Je sens qu’on a soufflé dessus.
J : Remets-toi en situation, quand tu es par terre et que tu vois tes lunettes.
N : C’est comme si j’étais dans une bulle. Je me vois seule. Je ne vois plus le reste. Je ne vois plus ma copine.
J : Toi, t’es dans ta bulle. OK. Cette bulle est confortable ?
N : Elle est ni confortable ni inconfortable. Elle épouse mes formes. Le chiffre qui monte pour évaluer son ressenti est 6.
 « Même si j’ai cette bulle, à 6, c’est ok, je m’accepte avec ce moment et je m’accepte totalement avec ce que je vis »
Ronde avec cette bulle / toute seule dans ma bulle / toute seule dans ma bulle / …
J : Reviens la voir, cette bulle.
N : Elle a changé. Elle est sortie, elle est partie. Elle s’est déformée. Je l’ai laissée partir. Elle est partie sans me demander mon avis.
J : Reviens à ce moment, quand tu es par terre. Tu prends conscience de la situation…
N : Je me dis qu’il faut que je sois stratégique et rapide. Deux choses viennent: le bébé et les secours. (Nadine confirme urgence et détermination avec l’index et le majeur)
J : Comment ton corps te dit ça ?… C’est chaud, froid, rigide, ça bouge peut-être …?
N : C’est rigide, je pense…ce mot me parle
J : Il est où ce rigide ?
N : Dans tout mon corps. Comme un bout de bois, à 10.

On tapote sur cette sensation, et Nadine note très vite le changement qui s’opère : C’est vraiment la bonne image. Le corps a repris le mouvement. Je suis passée à l’acte.
J : Est-ce qu’il pourrait rester quelque chose de désagréable ? comme peur, danger, force … quand tu y penses ?
N : Non plus de danger. Je suis dans le « Ah, quand même ! », dans ce danger absent, il y a une victoire, quelque chose d’heureux, car le bébé est en vie.
J : Donc victoire ; rien de désagréable ?
N : La vie repart, la vie revient, la vie est là et ça circule.
J : Si on revient en arrière, il y a des choses qui restent désagréables, dans la pensée… ?
N : Non.
J : Des sensations ?… Tu te souviens d’avoir été poussée ?
N : Oui.
J : Tu m’avais dit que tu ne t’en souvenais pas.
N : Le souvenir est revenu
J : Il y a longtemps que tu l’as retrouvé ?
 N : Je crois bien que c’est là… maintenant… Il vient de revenir.

Elle peut préciser : J’ai été poussée, jetée, dans l’indifférence, je gêne… L’image de l’objet surgit.
« Même si je gêne, à 10 (on reste sur ce moment qui semble résonner) c’est ok, je m’accepte avec tout ce que je suis. Je suis une fille super. »
Ronde avec : j’ai été jetée / comme si je ne comptais pas / jetée / jetée /…
La sensation passe à 3. On poursuit : Ce jeté encore à 3 / je m’en souviens maintenant / jetée /…
J : Est ce qu’il y a autre chose qui pourrait remonter ?
N : Après, j’ai eu de la douleur, le pouce retourné et j’ai atterri contre le mur.
Elle désigne son épaule droite, qu’elle pétrit de sa main gauche, le choc et la douleur à 7.
Ronde avec : ce choc / je l’ai encore à 7/ du côté droit / je l’ai encore à 7 / ce choc contre le mur / …
L’inconfort s’apaise, épaule, pouce… « Non, il n’y a plus rien. » Mon corps était endormi, cela me revient maintenant. Le bois raide me revient… »
Nadine qui a maintenant compris comment on pratique, reprend et complète toute seule la phrase : « Même si mon corps s’est endormi et c’est OK, il a fait le boulot, il valait mieux, merci mon corps, c’est formidable. »
Elle commente : C’est formidable, alors que je pensais que c’était horrible !
J : Alors tu t’es fait jeter, tu as atterri sur le mur et ton corps s’est endormi…
N : Rien d’inconfortable là.
J : Après, tu appelles les secours, tu sauves le bébé et tu penses à ta copine.
N : Je pense qu’à ça. Marion !
J : Il y a Marion avant que tu te fasses jeter ?
N : Non, il y a Marion après les lunettes.
J : Quand tu penses à Marion, l’inconfort est à combien ?
N : C’est 100 !

Ronde sur Marion, l’image qu’a gardée Nadine. Ce qui remonte, c’est la mort. On poursuit la séance avec cette vision qui s’est imposée : « Même si je vois la mort, j’aime et j’accepte la fille que je suis, et tout ce que je suis. »
Ronde avec : la mort / je vois la mort / je vois la mort / la mort / la mort /…
: Là, les larmes montent… C’est sensible… Le chagrin… C’est à 10.
La ronde qui suit récapitule les ingrédients : Ce chagrin à 10 / cette sensation avec les larmes qui montent / la mort / oui, je vois la mort / Marion / la mort / Marion / la mort…

J : Allons voir maintenant ce qui est là quand tu dis « la mort ».
N : C’est plus à 10, c’est parti.
J : Repense à Marion, qu’est-ce qui est encore inconfortable ? quelle est l’image de toute cette scène qui serait encore là ?
N : Il me vient l’image que je regarde la scène ; je suis au-dessus.
J : Là, c’est le signe que tu as distancé la scène… Tu n’es plus dans la scène… ?
Nadine ne manifeste plus d’inconfort.

J : Je vais te proposer d’arrêter là.  Nous travaillons depuis 1h 10, c’est déjà beaucoup.  S’il y avait quoi que ce soit qui remontait, tu vas pouvoir utiliser les points, tu as vu comment on fait ; et tu pourras m’appeler si nécessaire.

« C’est très impressionnant comment le niveau baisse », commente  Nadine.

Huit jours plus tard, Nadine atteste des bénéfices de cette séance :
« Je suis sortie de chez toi libérée de cette immense colère qui m’envahissait et ma nuit a été tellement légère ! Depuis ce jour, j’ai l’impression de revivre. Tout semble plus fluide. »

Je remercie, Nadine, d’avoir accepté la publication du travail que nous avons réalisé.

Si vous partagez ce témoignage, merci de citer vos sources:
Johanne Desterel, Praticienne et formatrice EFT, Zensight.
courriel :
 
jod470@orange.fr,  site : https://johannedesterel.com